HISTOIRE DE L’HÔPITAL
« Aux origines de l’Hôpital » : l’ancienne Maison de Saint-Yon
L’histoire de hôpital du Rouvray commence au XVIIIe siècle avec le Couvent de Saint-Yon, administré par les Frères des Écoles Chrétiennes (actuel Pôle des Savoirs) : en 1740, cette maison d’éducation se dota d’un « pensionnat de force » et d’une section destinée aux jeunes aliénés.
Le couvent disparut à la Révolution (1792). Un Dépôt de Mendicité y fut institué en 1808. Il fut remplacé en 1822 par l’Hospice d’Aliénés où furent mises en œuvre les toutes nouvelles théories de Pinel et Esquirol.
Malgré plusieurs séries de travaux, l’hospice se trouva vite en surpopulation. Il ouvrit bientôt une « succursale » à Quatre-Mares, matrice du futur CHR.
De 1845 aux années 1920
À la fin du XIXe siècle, l’hospice était divisé en deux parties distinctes. Celles-ci furent longtemps administrées séparément, seuls les Services Généraux et la Commission de Surveillance étant communs.
Sur les terres de Sotteville, la partie nommée « Quatre-Mares » était dédiée aux hommes. Elle fut édifiée entre 1845 et 1854 par l’architecte Grégoire, sous l’égide de Deboutteville et Parchappe. La partie orientale, connue sous le nom de « Saint-Yon » et située sur la commune de Saint-Etienne, était dédiée aux femmes. Projetée dès 1867, elle fut construite entre 1875 et 1879 sur les plans de Desmarets. Elle resta administrée par la communauté des sœurs de Saint-Yon.
Bien que conçus séparément, les deux asiles répondaient parfaitement par le choix du site et l’ordonnancement des bâtiments aux nouveaux standards de l’architecture fonctionnelle, hygiéniste et tout particulièrement aliéniste (Pinel, Esquirol, Parchappe). Dans un cadre champêtre et aéré, les malades étaient ainsi séparés selon le sexe, la classe sociale et le degré d’agitation. Ils vivaient cependant isolés du monde par de longs murs et en totale autarcie. Les bâtiments de chacun des asiles, répartis selon un plan rationnel, présentaient alors une grande homogénéité architecturale et étaient agrémentés de jardins (cours intérieures, vastes allées plantées, etc.). Les espaces à vocation vivrière (cultures, vergers, pâtures) étaient rejetés à la périphérie. Seuls la ferme et les ateliers se situaient au centre, à la jonction des deux asiles. En effet, ces services étant communs, les travaux étaient confiés aux hommes tandis que les femmes étaient employées au linge.
Carte postale ancienne représentant la grille d’entrée de l’Asile de Quatre-Mares au début du XXe siècle (architecte Grégoire, 1845-1854), aujourd’hui détruite.
De l’entre-deux guerres à la Sectorisation
Les deux asiles furent réunis en une Direction commune en 1920 sous le nom de Maison de Santé Départementale. Celle-ci devint Hôpital Psychiatrique Départemental en 1938, disposant désormais d’un meilleur confort (chauffage central, sanitaires), quoique surpeuplé. Par ailleurs, l’hôpital commença à s’ouvrir sur l’extérieur avec la création d’un Service libre.
Pendant la deuxième guerre mondiale, l’hôpital fut bombardé en 1942 et partiellement évacué en 1943. Il subit un dramatique bombardement durant la terrible Semaine Rouge (18-19 avril 1944) : 60 à 70 % de ses infrastructures furent détruites par plus de 800 bombes. Il fut partiellement occupé par l’armée américaine jusqu’en 1946 mais des travaux intervinrent dès 1944 pour qu’un service d’une centaine de lits pût rouvrir en 1945.
L’après-guerre vit la très lente reconstruction de l’hôpital, en lien cependant avec les approches nouvelles de la psychiatrie et l’apparition des neuroleptiques : moins d’enfermement, davantage de prophylaxie, amélioration et continuité des soins somatiques, personnel mieux formé, services ouverts, structures extra-hospitalières créées dès 1951 (Mignot, Bonafé). L’hôpital était désormais défini par quatre entités lui permettant d’être autosuffisant : unités de soins, blocs des spécialités médico-chirurgicales, centre social et services généraux/administration. Il était alors pensé comme un village doté de pavillons. De petits groupes de malades y étaient répartis selon la nature de leur pathologie et leur potentiel de sociabilité, avec toujours la séparation hommes/femmes.
Carte postale ancienne représentant le bâtiment de l’administration de l’Asile de Saint-Yon au début du XXe siècle (architecte Desmarets, 1875-1879), détruit en avril 1944.
De la Sectorisation géographique (1951-1963) à l’Inter-sectorialité
En 1963, une importante réforme de la psychiatrie réorganisa complètement l’offre de soins en santé mentale, en créant de nouvelles unités correspondant à un découpage sectoriel du département et en développant les soins extra-hospitaliers. Les conséquences furent immédiates avec la recomposition du plan de l’établissement non plus selon la séparation par sexe mais autour d’un zonage par type d’activités. D’anciens bâtiments disparurent au profit de petits pavillons modélisés à l’espace fortement structuré. Le projet définitif fut adopté en 1969 et les premiers travaux menés de 1971 à 1972.
Parallèlement, le cadre juridique de la sectorisation se mit en place. L’année 1968 vit l’ouverture du Centre Autonome de Neuropsychiatrie Infantile (C.A.N.P.I.) ainsi que la mise en application de la loi modifiant le statut des hôpitaux psychiatriques. L’Établissement Public Départemental vit le jour, disposant désormais d’une commission administrative dotée d’un pouvoir de décision. Il prit en 1973 le nom de Centre Psychiatrique du Rouvray puis en 1979, Centre Hospitalier Spécialisé du Rouvray, enfin en 1991 celui de « Centre Hospitalier du Rouvray ».